Le Musée National des Beaux-Arts d’Occident à Tokyo, prototype du Musée à croissance illimitée transposable mondialement, atteste la réception de longue date de L’Œuvre architecturale de Le Corbusier au Japon et de l’universalisation du Mouvement moderne. Bâtiment figurant dans la série inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco, 2016Un riche Japonais résidant à Paris, M. Matsukata, avait constitué une collection imposante d'art impressionniste: peinture et sculpture. A la guerre de 1939, cette collection fut considérée comme prise de guerre par le Gouvernement français. Après les pourparlers utiles, cette collection est restituée au Gouvernement japonais à condition que celui-ci l'abrite à Tokyo dans un édifice nouveau qui sera appelé "Le Musée National des Beaux-Arts de l'Occident", destiné à faire connaître d'une manière scientifique au peuple japonais l'évolution passée, actuelle et future de l'art occidental à partir de l'impressionnisme.
Le Gouvernement japonais fit appel à Le Corbusier pour construire ce musée. II octroya une parcelle d'un parc déjà occupé par des Musées d'Histoire Naturelle, de Beaux-Arts, de Sciences, etc ... Ce terrain est couvert de beaux arbres; il est situé au bord d'un plateau dominant Tokyo et bénéficiant d'un panorama illimité sur la ville.
Le Corbusier poursuivant des études remontant à plus de 25 années, installe sur ce terrain une version du "musée à spirale carrée". Mais il l'accompagne d'un pavillon des expositions temporaires et d'un édifice voué au théâtre et aux recherches théâtrales nouvelles, baptisé par lui, depuis longtemps : "Boîte à miracles". Cet ensemble constitue, selon le désir du Gouvernement japonais, un centre culturel. Il découle directement des études faites en 1950 pour le terrain de la Porte-Maillot à Paris, tentative que firent échouer certaines impatiences et voracités...
Ici à Tokyo, le Musée lui-même fut exécuté par deux architectes japonais qui, en 1928, en 1931 et enfin après la guerre avaient travaillé longuement à 35, rue de Sèvres: Maekawa, Sakakura.
On accédera à la salle centrale à double hauteur en passant sous les pilotis. Cette salle illustrera le XIXe siècle avec son visage si sensationnel de créations révolutionnaires, d'organisation - berceau de la nouvelle civilisation machiniste. Quelques œuvres excellentes peintes ou sculptées de la Collection Matsukata y seront montrées, mais les murs, du sol au plafond, seront revêtus d'une immense fresque photographique. Cet art qui n'a pas encore pris conscience de lui-même et dont Le Corbusier avait fait une première application au Pavillon suisse de la Cité universitaire de Paris et ensuite au Pavillon des Temps-Nouveaux en 1937 à l'Exposition "Art et Technique" ainsi que dans des maisons privées, est capable d'atteindre une expression monumentale.
Au devant s'étendent les trois forums dallés de pierre du Musée, du pavillon des expositions temporaires et de la Boîte à miracles. La composition bien que cohérente laisse à chacun des édifices, qui sont si fondamentalement différents, l'intégrité de leur caractère.
Extrait de Le Corbusier,
Oeuvre complète, volume 7, 1957-1965