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Billeterie

Cité Frugès

Pessac, France, 1924-1926

« Je te l’ai dit, mettant la modestie sous les boisseau, je suis épaté. Épaté d’assister à un phénomène architectural absolument neuf, inédit, non pas bizarre, mais nous disant : les choses ont changé , il y a un nouvel esprit, voilà une manifestation de ce nouvel esprit. »
Lettre de Le Corbusier à sa mère, fin mai 1826

La commande

La Cité Frugès est conçue par Le Corbusier et Pierre Jeanneret à la demande de l’industriel sucrier bordelais Henry Frugès, qui fait appel à Le Corbusier après avoir lu Vers une Architecture. Dans une interview du 13 mars 1967, il raconte : « Un jour, un article me tombe sous les yeux, d’un homme tout à fait inconnu : Le Corbusier. Je suis frappé par le bon sens de cet auteur. C’était très révolutionnaire mais les idées étaient pleines de bon sens. »

Il s’agit du projet le plus ambitieux réalisé pour Henri Frugès, voulant lier progrès social et art pour l’habitat ouvrier. Pour l’industriel bordelais, Le Corbusier conçoit déjà la maison du Tonkin, prototype réalisé dans l’enceinte de sa raffinerie à Bordeaux, ainsi que l’ensemble de Lège-Cap-Ferret, projet pour loger les ouvriers de sa scierie.

Le projet de Le Corbusier ne sera pas réalisé en totalité. Uniquement deux secteurs sur quatre et 51 maisons, destinées cette fois-ci à la vente, seront construites. Une maison sera bombardée (maison isolée grand modèle), laissant donc aujourd’hui 50 maisons dans la Cité.

Cité Frugès, Pessac © FLC / ADAGP / Filippo Poli
Cité Frugès, Pessac © FLC / ADAGP / Filippo Poli

Le projet

Le Corbusier expose le projet pour les Quartiers Modernes Frugès (QMF), dont le premier plan-masse date du 24 juillet 1924, dans la plaquette de présentation du quartier : « Il se dégage des constructions de Pessac une esthétique inattendue, neuve. Mais cette esthétique est licite, conditionnée par les impératifs d’une part de la construction et, d’autre part, par les bases primordiales de la sensation architecturale, le volume. ».

Malgré le recours à un module standard, le même que celui de Lège, un carré de 5 mètres de côté, et un type architectural de base composé de deux niveaux d’une travée et demie (B1L), l’ensemble de la Cité n’est ni répétitif ni monotone.

À travers la simple adjonction d’une ou plusieurs travées au type B1L, les architectes parviennent en effet à réaliser différentes typologies de maisons : les maisons à arcades, les gratte-ciels, les maisons en quinconce, les maisons zig-zag, les maisons jumelles et les isolées. Le choix d’une polychromie variée pour les façades des maisons enrichit cette perception.

Le chantier des QMF commence en 1925. Il s’agit d’un chantier d’expérimentation de la standardisation de la construction, mais l’incompétence du directeur de chantier et l’inexpérience des entreprises locales, notamment pour utiliser le canon à ciment, conduisent rapidement à une impasse. Le Corbusier fait alors appel à son entrepreneur parisien, Georges Summer, pour reprendre les travaux en mai-juin 1925. Le chantier des secteurs C et D est achevé et revient à la méthode plus traditionnelle de murs en parpaings de mâchefer.

Les nombreuses modifications et difficultés techniques grèvent le budget de Frugès. Les retards dans l’adduction d’eau et des services d’urbanisation de la Ville risquent de conduire l’entrepreneur à la faillite. Les secteurs A et B ne seront jamais réalisés.

Les maisons construites resteront vacantes jusqu’en 1929, quand la cité est finalement raccordée à l’eau.

Cité Frugès, Pessac © FLC / ADAGP / Filippo Poli
Cité Frugès, Pessac © FLC / ADAGP / Filippo Poli

Le devenir de la Cité

Des problèmes de dégradation se posent très vite, liés au fait que les maisons n’ont pas été habitées et entretenues depuis leur construction. Les habitants apportent rapidement des modifications au niveau des intérieurs mais aussi des façades (châssis de fenêtres, toit-terrasse) et certaines sont encore visibles aujourd’hui. 

En 1976, la Cité Frugès est inscrite à l’inventaire des sites pittoresques du département, après la première restauration d’une maison, le 3 rue des Arcades, classée monument historique en 1980. Une Zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) est mise en place en 1998. En 2016, la Cité Frugès est inscrite sur la Liste du patrimoine mondial avec seize autres œuvres ou sites. Cette reconnaissance de l’ensemble de la Cité a enfin déclenché la protection des maisons au niveau de la parcelle, comprenant les jardins, les clôtures mais aussi les intérieurs. Les cinquante maisons sont aujourd’hui protégées au titre des monuments historiques.

La Cité Frugès peut être considérée comme un laboratoire expérimental de recherche formelle et technique à différentes échelles, de la ville au mobilier.

  • Cité Frugès, Pessac
    Photo : Paul kozlowski 1995
    © FLC/ADAGP
  • Cité Frugès, Pessac
    Photo : Paul kozlowski 1995
    © FLC/ADAGP
  • Cité Frugès, Pessac
    Photo : Paul kozlowski 1995
    © FLC/ADAGP
  • Cité Frugès, Pessac
    Photo : Paul kozlowski 1995
    © FLC/ADAGP
  • Cité Frugès, Pessac
    Photo : Paul kozlowski 1995
    © FLC/ADAGP
  • Cité Frugès, Pessac
    Photo : Paul kozlowski 1995
    © FLC/ADAGP
  • Cité Frugès, Pessac
    Photo : Paul kozlowski 1995
    © FLC/ADAGP
  • Cité Frugès, Pessac
    Photo : Paul kozlowski 1995
    © FLC/ADAGP
  • Cité Frugès, Pessac
    Photo : Paul kozlowski 1995
    © FLC/ADAGP
  • Cité Frugès, Pessac
    Photo : Paul kozlowski 1995
    © FLC/ADAGP
  • Cité Frugès, Pessac
    Photo : Paul kozlowski 1995
    © FLC/ADAGP
  • Cité Frugès, Pessac
    Photo : Paul kozlowski 1995
    © FLC/ADAGP